16 mars 2006

Tu tue je

Tu saisis ce pronom et puis tu lances des mots sur la piste. Tu espères, tu te demandes si ce « tu » est un autre. Tu cherches derrière le miroir, tu te sens pointé, l’index retourné vers cet usurpateur et le doute s’installe. Tu découvres ce voile à peine opaque, ce désir à peine voilé, il se peut que le malaise s’installe, tu prends ton ticket et tu attends.
Tu ne vas pas très bien en ce moment, tu réfléchis beaucoup, tu renifles sur ta vie. Quand la lumière est belle, tu estimes avoir de la chance. Tu relativises, tu prends de la distance, tu sais qui tu es. Tu sais ce que tu as gagné, tu sais ce que tu laisses derrière, tu sais ce qu’il te reste à faire.
Finalement tu te sens agressé, tu résistes, tu ripostes, tu n’es pas un être mêlé, amalgamé, tu n’es pas pensé, tu n’es pas dicté. Peut-être spécules-tu sur le hasard et tu scrutes de l’autre côté du rideau la main qui te semble faire un signe.
Tu t'énerves, mais enfin, cela rime à quoi ! Tu te demandes encore, s’il est des comédies plus puériles, des expériences plus inutiles, ou plus maladroites que cet échange gauche de signes. Deux grammes de grammaire amusante dans une soupe claire. Un peu de colère, un peu d’ironie teintée d’ennui, quelques questions, un fugace vertige, une parenthèse essayée. C’est pour rire, mais déjà tu comprends que le « je » n’existe que le temps de le dire ou bien de le lire, il n’est utile que lorsque le dialogue se noue, et même dans un cahier intime où je dors sur ma page et interroge mon passé, je deviens un autre pour me lire.
Le je passe le relais. Toujours. Même si les réponses ne s’affichent pas. Tu te demandes une dernière fois ce que tu peux bien répondre.

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